MISSION HUMANITAIRE
Je suis allée travailler au comedor Divino Niño de Tamboril. Depuis novembre 2011, j’y ai fait 5 séjours dont 2 de 6 mois et par la suite 3 d’un peu plus de 3 mois.
De 25 à 40 enfants, de 4 à 12 ans le fréquentent de 8h à 12h30, du lundi au vendredi. Ces enfants vont à l’école en après-midi. Ce sont des enfants vivant dans des zones défavorisées aux prises avec le chômage, la prostitution, des problèmes de violence conjugale, d’alcool et de drogue. Ce sont pour la plupart des enfants négligés, violentés, certains abandonnés par leurs parents et d’autres abusés sexuellement. Ce sont pour la plupart des enfants violents ou effacés.
En novembre 2011, je suis arrivée à Tamboril pleine de bonne volonté, prête à faire de tout sans trop savoir quoi. Je pouvais communiquer en espagnol mais j’avais beaucoup de difficulté à comprendre les enfants. Ce fut donc mon premier défi.
Je suis retraitée de l’enseignement où j’ai enseigné 16 ans à des enfants ayant des difficultés graves d’apprentissage et/ou de comportement. J’étais habituée à travailler à l’intérieur d’un horaire, avec une planification bien établie et une tâche bien définie. Ce n’est pas comme ça que ça fonctionne au comedor. Ce fut donc un autre défi de participer sans juger. Je pense que c’est pour moi le défi qui se poursuit d’année en année. Accepter l’autre tel qu’il est et travailler avec, sans juger. Ma culture me suit, mes expériences me suivent, ma formation me suit, c’est ce que je suis. C’est aussi ainsi pour l’autre personne avec qui je veux travailler. Je découvre à chaque jour que les choses peuvent se faire autrement. C’est le début de mon adaptation.
Lors de mon premier séjour, j’ai eu comme tâche d’élaborer et de réaliser 2 cours pour développer des habiletés manuelles et/ou artistiques. En prévilégiant des matières recyclables, les enfants font différents projets qui sont présentés lors d’une exposition avant mon départ. Quand j’y retourne c’est encore ce que je fais. Depuis 3 ans je suis seule avec un groupe de 13 à 17 jeunes, seule aussi à faire la discipline. Ce sont des enfants qui ont des difficultés de concentration, d’attention et de comportement. Ce sont des enfants qui manquent d’affection, qui demandent de l’attention et qui le manifestent souvent par la violence verbale et physique ou le silence. Ce sont aussi des enfants souriants, généreux, travaillants, vivants, joyeux et attachants. Ma tâche est donc de trouver comment répondre à tous ces besoins d’attention et d’affection tout en réalisant des projets concrets où j’essaie de développer l’attention, la concentration, l’ordre, le respect des gens et du matériel, la discipline, l’estime de soi, la persévérance, le souci du travail bien fait et ma patience. Il faut du temps pour s’apprivoiser et établir une relation d’amitié et de confiance. Je profite de tous les autres moments libres de l’avant-midi ou des fêtes spéciales pour jouer avec eux, les écouter ou les serrer dans mes bras.
En éducation il est difficile d’évaluer la portée de son travail. Les photos montrent ce que j’ai fait avec les enfants. Mais comment voir ce que j’ai fait pour les enfants? Les sourires, les câlins et les larmes à chaque départ me laissent croire que ce fut apprécié.
Ce dont que je suis fière : j’ai fait de mon mieux. Ce que j’ai appris : la pauvreté c’est complexe. Ce que j’en retiens : la tâche est immense. Comment outiller ces enfants pour une vie décente?
Au comedor, les enfants y trouvent un lieu sécuritaire et stimulant, où chaque adulte, avec ses talents et avec amour, tente d’améliorer le destin de ces petits.
En plus d’améliorer mon espagnol cette expérience suscite en moi un questionnement face à la consommation, au partage, à mes jugements, à l’écoute des autres et l’acceptation de la différence. Rien n’est acquis, tout est en voie de développement.
Merci à la congrégation de m’avoir permis de vivre ces expériences, merci aux sœurs dominicaines pour leur accueil et le respect de mes différences. Je vais y retourner
SI DIOS QUIERE
Pauline St-Pierre
