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LA VIE CHEZ-NOUS


A toute la famille, amis(es) et sœurs de la congrégation NDPS n’ayant pu assister aux funérailles de sœur Tharsile Fortier, vu les circonstances actuelles, nous vous présentons la cérémonie qui a eu lieu le 10 novembre dernier à la Chapelle de la Maison mère.


Autobiographie de sr Tharsile Fortier (Sr Claire-des-Anges)

Dès ma naissance, le 3 janvier 1924, j’ai été plongée dans les sources profondes de la grâce divine. Créée à l’image de Dieu, baptisée dans l’Esprit Saint, ouverte sur une espérance sans limite; j’étais déjà sans le savoir désir de Dieu. Mes parents, Adalbert Fortier et Claire Fortier, ont voulu susciter au sein de notre famille, une atmosphère favorisant l’accueil des visites de Dieu. Mon père était un contemplatif dans l’action. À le voir prier, j’étais invitée à entrer en communication avec Celui qui semblait combler son cœur. Ma mère, une femme forte et courageuse a gardé au cœur une confiance contagieuse en dépit des souffrances et des épreuves qui auraient pu si bien l’ébranler. Dieu avait gratifié mes parents de riches dons naturels. Leur vie était invitation à un plus-être. La lumière de la foi les guidait sur une route souvent ombrée et rocailleuse.

Je suis la troisième d’une famille de dix enfants : cinq filles et cinq garçons. Enfant, j’aimais le grand silence de la nature qui me parlait de Dieu et créait en moi le goût de la rencontre avec Lui. La quête de toute ma vie ne sera autre que l’appel à l’intériorité… Une soif de silence, de solitude, de paix, habitait profondément mon âme. Une invitation d’orientation vocationnelle pour jeunes filles, venant de Saint-Damien, m’interpella. Ce fut le discernement et la décision. Et me voilà, à dix-sept ans, chez les religieuses de Notre-Dame du Perpétuel Secours, sans retour dans ma famille.

Le temps passé au noviciat fut une traversée au désert; tout me paraissait à contre-courant de ce que j’avais vécu auparavant. Ce qui me réconforta et me permit de respirer plus sainement fut la faveur d’être assignée à l’étude. Quelques mois avant ma profession, je suis allée enseigner à Château-Richer. Dans ce milieu, j’ai connu celle qui était supérieure générale lors du décès de notre fondatrice. Oh! si j’avais su à ce moment… que de questions je lui aurais posées!

Le 9 janvier 1944, au lendemain de ma profession, ce fut l’envol vers les lieux d’enseignement, lieux divers mais toujours comblants : joies inoubliables dans de petites fraternités. Qu’il était bon vivre en partageant ce qui composait chacune de nos journées, jours enrichis de situations toujours inédites. Enseigner, rencontrer des jeunes, c’était vivre du neuf et entendre l’appel des lendemains qui ouvrent sur de grands horizons. Dieu m’a parlé par des jeunes; il m’a appris à les regarder et à les aimer avec son Cœur. Ils ont écrit, pour moi, des pages d’évangile. Dieu m’appelait à plonger plus profondément en m’ouvrant les sources d’eau vive de l’Écriture sainte. Celles-ci furent un souffle vivant dans mon histoire personnelle.

En 1977, j’eus la faveur de voir approuver le projet de l’ouverture du Centre Prière et Paix. La quête de ma vie m’ouvrait de nouveaux chemins… Je ne saurais passer sous silence ce que fut, pour moi, la découverte de la spiritualité de nos fondateurs. Que d’heures passées à écouter battre leur cœur, à laisser résonner leurs appels, pour pouvoir enfin partager ce qu’ils m’ont révélé à travers les volumes : Mendiant des Pauvres et Dans la Main de DieuCollaborer avec sœur Jeanne Blais pour des sessions sur la spiritualité de l’icône a aussi comblé ma soif d’eau vive. Je dus en approfondir la théologie pour communiquer le désir de contempler le visage du Christ dans l’icône. Que d’actions de grâce à rendre pour la gratuité de Dieu !

Mais le secret qui nous habite ne peut se dévoiler qu’à travers l’épreuve. Il existe des bienfaits cachés derrière chacune de nos souffrances. Ai-je eu assez soif de cette eau vivifiante venant des sacrements, surtout de l’Eucharistie et des invitations à toujours plus d’intimité avec le Christ à l’exemple de Marie, la Vierge du Perpétuel Secours, qui fut toujours si près de moi?

Avec chaque membre de ma famille, avec toute ma communauté, je veux reprendre ce que j’ai si souvent chanté avec mes compagnes : « Que mon cœur ne se taise pas, Qu’il soit en fête pour toi, Et que sans fin, Seigneur mon Dieu, je te rende grâce »!    (Ps 30,13)

Chère sœur Tharsile,
Difficile d’ajouter à ce que tu nous as révélé de toi… Tu as aimé, donné et beaucoup   souffert. Depuis 2008, la maladie t’a enlevé la possibilité de marcher mais tu es restée autonome jusqu’à la fin grâce à ton fauteuil électrique. Ta vie a été une longue quête d’infini. Ta soif trouve enfin le repos, elle est maintenant comblée. Le Seigneur qui t’a rappelée à lui saura te faire partager un bonheur qu’on ne peut mesurer ! La réflexion profonde de tes écrits sur nos fondateurs et ton amour pour eux se continueront en nous. Nous t’en sommes infiniment reconnaissantes et tu nous resteras bien présente. Sois heureuse et comblée infiniment comme tu l’as si longuement désiré.

Repose en paix.