Un jour, un homme, mallette à la main.
Il est pressé et il fend la foule pour arriver à temps au bureau.
Il ne voit même pas cette vieille femme qui lui tend une fleur en lui disant :
« Une fleur, monsieur ».
Le lendemain, il était de nouveau dans la foule.
Cette fois, il était à temps et il vit la vieille dame. Il se disait :
« Pourquoi la laisse-t-on importuner les gens si tôt le matin ? »
Il la dépassa à toute vitesse sans porter attention à son :
« Une fleur, monsieur. »
Le jour suivant il chercha comment il pouvait l’éviter.
Il comprit que c’était impossible. Alors il fonça vers la vieille dame qui lui dit :
« Une fleur, monsieur » et lui adressa son plus beau sourire.
Il mit la main dans sa poche : « Combien ? », dit-il.
Comme elle ne répondait pas, il lui lança quelques pièces de monnaie.
Rendu à son bureau il pensa jeter la fleur mais il se ravisa.
Il l’avait payée trop chère pour la jeter et il la déposa dans un verre d’eau.
Peu à peu, de matin en matin, il se mit à accepter la fleur
et le sourire que la vieille dame lui offrait.
Il en avait toujours un bouquet sur son bureau.
Les gens lui faisaient des compliments pour les belles fleurs sur son bureau.
Ses relations étaient meilleures.
Il en est même venu à avoir hâte de voir la vieille dame,
de recevoir sa fleur et son sourire. Sa journée serait bonne.
Un bon matin il s’approcha de la vieille dame les bras derrières le dos.
« Une fleur », lui dit-elle en souriant.
Il prit le bouquet de marguerites qu’il tenait derrière son dos et le donna à la vieille dame.
Tous les deux échangèrent le plus beaux des sourires.
J’ai apporté un bouquet de marguerites pour vous dire « merci ».
Denis Lepage, Symphonie pastorale, 2013